Dans une fédération danoise, homologue de Grands Formats, on m’a récemment interrogée sur la France.
Au Danemark, on regarde la France comme un pays de merveilles. L’intermittence, la diversité culturelle, les aides au secteur en général font rêver la plupart des interlocuteurs étrangers.
J’ai pu leur rapporter qu’en France, un artiste doit avoir une structure pour espérer être identifié, et même soutenu par les organismes. Les systèmes de subventions sont de plus en plus complexes, l’administration en général est lourde dans le pays, et il est donc difficile de s’en sortir sans beaucoup déléguer. Pour cette raison, les artistes sont sensés être « structurés », donc avoir des équipes, ce qui a un vrai coût.
Malgré une certaine parenté avec d’autres organisations similaires à l’étranger, Grands Formats reste unique dans son fonctionnement et en tant qu’organe représentatif. Dans la négociation, jusqu’ici hors du champ syndical, Grands Formats porte nos voix à un niveau que le poids économique des ensembles à l’équilibre forcément fragile, nécessairement risqué, ne permet pas d’atteindre.
La concentration des subventions autour du CNM facilitent son fonctionnement administratif, au risque de réduire l’intervention des institutions et les aides spécifiques à des secteurs de la musique. Au Danemark, une partie des fonds sont distribués par la « Sacem » danoise. Cet organisme de droits d’auteur estime que les nombreuses « fédérations spécialisés » qui ressembleraient à Grands Formats, FEVIS ou Futurs Composés, sont plus proches des réalités des artistes membres. Elle canalise donc une bonne partie des subventions à travers ces fédérations qui deviennent des guichets de proximité. Ce fonctionnement est considéré comme juste dans le pays, et incite par conséquent les artistes à se fédérer.
La « pensée administrative » en France, dont le centralisme peut sembler déroutant pour la plupart des musiciens européens, est avant tout structurée par un idéal d’égalité et de simplification. Mais cela s’accompagne aussi de critères normatifs et de nombreuses exceptions et dérogations sensées rééquilibrer les injustices que la norme engendre de facto. J’espère que Grands Formats pourra amplifier son influence sur les partenaires subventionneurs et mieux faire correspondre leurs critères d’attribution avec la réalité de nos pratiques.
Par Line Kruse pour Line Kruse Orchestra