Une excellente année 2020

Nous vous souhaitons, au nom de la fédération Grands Formats, une excellente année 2020.

La décennie qui s’achève a été marquée par le dynamisme de notre fédération et le très grand nombre de nouveaux membres qui ont souhaité la rejoindre chaque année. Grands Formats est passée en dix ans d’une vingtaine de membres à plus de 80 orchestres et collectifs d’artistes et elle représente aujourd’hui plus de 1200 musicien·ne·s professionnel·le·s en France et en Europe. Elle reste la seule fédération dans notre paysage qui est portée par des artistes, chef·fe·s d’orchestres et compositeur·rice·s.
Nous sommes également tous des artistes-producteur·rice·s. Et ce point est essentiel par rapport à la façon dont nos activités se sont structurées ces dernières années, entre autres en ce qui concerne l’accès aux aides et subventions dont nous bénéficions aujourd’hui directement. Cela a contribué à mettre en place un mode de fonctionnement économique, certes complexe mais vertueux, permettant une grande indépendance artistique et très éloigné du modèle porté par les géants de l’industrie culturelle qui lui repose principalement sur la recherche du profit.

Mais nous devons redire ici que la décennie qui se termine a aussi été très préoccupante pour nos ensembles. Comme le montrent les données que notre fédération a récoltées régulièrement auprès de nos membres ces dernières années, les conditions d’exercice de nos métiers sont beaucoup plus difficiles aujourd’hui : par exemple, le nombre de concerts par orchestre ainsi que le prix de cession moyen ont très fortement baissé en 10 ans. Nous avons également observé que les inégalités ont fortement augmenté entre les ensembles, et que ce sont les programmes de création qui souffrent le plus d’un déficit de diffusion. Nous pointons auprès de nos partenaires ce problème conjoncturel depuis de nombreuses années et il apparaît qu’il existe, aujourd’hui encore plus qu’il y a dix ans, une immense contradiction entre le dynamisme toujours croissant de la création dans notre pays et l’incapacité des réseaux de diffusion à absorber cette création.

Bref, les acquis de ces dernières années sont fragiles.

Cette nouvelle année 2020 sera une année charnière pour notre milieu. Et la décennie qui commence verra se modifier beaucoup des équilibres fragiles qui permettent aux musiques que nous défendons de vivre. Au 1er janvier 2020, le Centre National de la Musique a vu le jour. Cet établissement dont le détail des missions et de la gouvernance reste encore flou (la constitution du Conseil d’Administration a été annoncée mardi, nous attendons encore des précisions concernant le Conseil Professionnel) va à long terme grandement modifier l’économie de notre milieu. Ensuite le projet de loi « 3D » (décentralisation, différenciation et déconcentration) qui doit être présenté au parlement au printemps 2020 va redéfinir profondément le rôle de l’État dans le financement de la culture et fragiliser la DGCA et les DRAC au profit des collectivités territoriales. Les politiques culturelles menées par les régions pèseront de plus en plus dans le financement de la musique.

Contrairement aux annonces pétries de bonnes intentions faites par l’État et par les collectivités, nous voyons aussi l’ensemble de ces changements comme un potentiel danger. L’écosystème, constitué d’un maillage extrêmement complexe et interdépendant, qui permet aujourd’hui l’existence d’une très grande diversité musicale dans notre pays risque d’être gravement mis à mal si nous, les musicien·ne·s, les compositeur·rice·s, les chef·fe·s d’orchestre, ne participons pas plus activement à ces changements. En particulier, les propositions artistiques risquent d’être évaluées non plus sur des éléments artistiques mais soit sur des critères de pure rentabilité économique soit sur des critères servant uniquement l’intérêt des politiques publiques locales.

Grands Formats doit donc plus que jamais contribuer par ses propositions à permettre de sauvegarder un certain nombre de priorités pour les politiques publiques en matière de culture. Car face au rouleau compresseur de l’industrie culturelle, nous devons continuer à agir avec l’ensemble de nos partenaires pour permettre à la diversité que nous représentons d’exister afin de garantir aux publics futurs de pouvoir écouter la création musicale de demain.

Ainsi en 2020, notre fédération est bien nécessaire car ce qui a été construit dans notre secteur depuis vingt ans peut disparaitre demain si, collectivement, nous ne nous mobilisons pas tous.

Frédéric Maurin, directeur artistique de l’Orchestre National de Jazz et membre du Conseil d’Administration de Grands Formats.


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