Lettre ouverte à Spotify France

La communication de Spotify France au sujet de la taxe streaming visant à la discréditer dans l’opinion du public est trompeuse et mensongère.

Contrairement à ce qu’elle indique, l’augmentation du prix de l’abonnement premium à Spotify n’a pas été « imposée par le gouvernement français », elle est un choix délibéré de la direction de la plateforme. D’autres auraient pu être faits, celui, par exemple, de faire supporter le coût de la nouvelle taxe streaming à ses actionnaires plutôt qu’à ses abonnés.

Quant à la taxe streaming elle-même, elle est le résultat d’un long processus de réflexion au sujet du financement de la filière musicale française, notamment menée dans le cadre de la mission confiée au sénateur Julien Bargeton par la précédente ministre de la Culture Rima Abdul-Malak et qui a donné lieu à la publication d’un rapport complet en avril 2023. La plus grande partie des représentants de la filière ont été concertés lors de sa phase préparatoire et une large majorité d’entre eux s’est prononcée en faveur de la création de cette taxe streaming, comme en témoignent les multiples communiqués de presse signés par un grand nombre de réseaux en 2023. Cette taxe vise à financer le schéma d’intervention du Centre National de la Musique (CNM), en aucun cas son fonctionnement, tel que le laisse entendre Spotify France – le fameux « budget administratif du CNM s’élevant à 20,2 millions d’euros », qui, lui, est intégralement financé par le ministère de la Culture. Il n’est pas non plus question de créer un « intermédiaire supplémentaire » – et entre qui et qui d’ailleurs ? – mais de constituer des financements pérennes pour un acteur déjà existant et qui a pour mission non seulement de « fournir des subventions financières aux maisons de disques et à l’industrie du spectacle vivant », mais aussi de promouvoir la diversité des expressions culturelles, telle que l’indique la loi de fondation de l’établissement et de palier les dysfonctionnements du marché de la musique que Spotify contribue dans une large mesure à perpétuer. Concrètement, d’aider financièrement et directement la production musicale.
Notons en outre la légitimité de la contribution d’acteurs qui y avaient jusque-ici échappé, alors que le secteur du spectacle vivant contribue déjà au financement du CNM depuis sa création par l’intermédiaire de la taxe sur les spectacles de variétés et les concerts de musiques actuelles et que les équivalents aux plateformes de streaming du secteur audiovisuel contribuent eux-aussi, par l’intermédiaire de la taxe sur la diffusion en vidéo physique et en ligne de contenus audiovisuels (TSV), au financement de leur secteur d’activité, non au taux de 1,2 % retenue pour la taxe à laquelle est soumis Spotify France, mais à celui de 5,15 %.

Enfin, il est faux d’affirmer de façon péremptoire que « Spotify a fièrement défendu les artistes français au cours des 15 dernières années ». Spotify n’a jamais défendu que ses intérêts économiques et l’on serait bien en peine de trouver dans l’activité de la plateforme quoi que ce soit qui aille dans le sens d’un soutien à la diversité des modèles économiques, qui concerne pourtant véritablement les artistes français, ou aux esthétiques les plus nichées.
Quant aux revenus des artistes eux-mêmes, il suffit de s’intéresser aux montants de ceux d’entre eux qui échappent au radar des tendances et ne bénéficient en rien du marketing de Spotify pour se rendre compte de la supercherie. Récemment, avec le seuil de 1000 écoutes, ils ont tout bonnement été exclus des répartitions.

On ne peut recevoir autant d’un système qui, au bout d’une chaîne partant, rappelons-le, des artistes qui créent la musique que vous exploitez, vous permet une telle abondance et, dans le même temps, ne pas vouloir y participer en retour.

La fédération Grands Formats réaffirme fermement son soutien à une taxe streaming qui permet la contribution équitable de tous les acteurs de la filière musicale pour des politiques culturelles vertueuses et appelle à ce que cessent ces déclarations spécieuses.

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