Le secteur culturel est profondément ancré dans les valeurs de liberté, d’égalité, de fraternité.
Notre raison d’être consiste à faire partager des émotions, à faire réfléchir, à faire échanger des personnes, de tout âge et de toute condition, rassemblées (dans une salle de concert, un théâtre, un chapiteau, dans la rue, une salle d’exposition, un musée, un cinéma, une bibliothèque…). Quand la substance même de notre action réside dans la recherche de la participation de toutes et tous à la vie culturelle, comment le gouvernement peut-il nous donner l’injonction de trier les personnes et de leur refuser l’accès à ces espaces collectifs d’émancipation ? Alors même que notre pays a plus que jamais besoin d’expression, de création et de lien social, nous sommes persuadés de l’intérêt général de la culture.
Nos organisations sont conscientes de la gravité de la pandémie et soucieuses de la protection de la population comme de celle de leurs salarié·e·s et de leurs partenaires. Nous sommes évidemment convaincu·e·s du soutien public renforcé qui doit être apporté à la santé, comme bien commun et bien public, et de la solidarité qui doit s’exercer au niveau mondial, notamment par la levée des brevets sur les vaccins.
Pour autant, nos organisations ont-elles à assumer le transfert de responsabilité des décisions prises par le Gouvernement ? Sommes-nous la 1ère ligne impliquée dans la mise en œuvre du programme visant à « emmerder les Français non vaccinés » ?
Nos organisations sont consternées de devoir contrôler le statut vaccinal de leurs équipes salariées et de leurs nombreux bénévoles. Nous sommes face à des contradictions sur le plan sanitaire. Si nous avons le devoir – et la volonté – de protéger nos collègues, une équipe devra refuser un emploi à une personne présentant une preuve qu’elle n’est pas positive au Coronavirus, alors que, dans le même temps, une personne ayant un passe vaccinal pourrait être positive et contaminer le reste de l’équipe.
Les choix artistiques, les choix de programmation sont désormais soumis à la condition d’un passe vaccinal. Nous ne devrions pas avoir à imposer une telle contrainte auprès des équipes artistiques et de tout∙e intervenant∙e avec qui nous construisons des projets. Dans le spectacle vivant, un·e seul·e artiste non vacciné·e, non remplaçable, implique l’annulation de représentations, de résidences de création, d’actions d’éducation artistique et culturelle. Les conséquences sont ainsi multiples et sévères pour l’ensemble des équipes qui risquent de perdre leurs revenus comme pour nos concitoyen·ne·s privé·e·s de spectacles.
Nous voyons des équipes artistiques exploser de l’intérieur pour des différences de statut vaccinal, au risque de briser des relations et des personnes, d’assécher notre vivier artistique, d’empêcher tant son éclosion que son développement.
Depuis novembre 2015, les établissements recevant du public (ERP) ont vu s’appliquer le plan Vigipirate, la loi sécurité globale, puis, depuis 2020, des protocoles sanitaires qui se sont enchaînés. Rien qu’en 2021, nous avons été soumis à 9 protocoles différents et les changements de règles continuent en 2022… Comment le public peut-il s’y retrouver ?
Cet enchaînement de procédures sécuritaires et sanitaires laisse des traces et risque de changer la nature et la perception de nos établissements et événements : de lieux de convivialité et de partage vers des lieux de contrôles et de contraintes…
Nos organisations sont confrontées à une crise grave et inédite qui sera lourde de conséquences à long terme. Les équipes permanentes, les artistes, les technicien∙ne∙s travaillant dans la culture sont entravé·e·s dans leur liberté fondamentale d’exercer leur profession. Les risques psychosociaux n’ont jamais été aussi prégnants dans toutes les professions de notre secteur. Nous n’avons jamais connu un tel désarroi.
À notre connaissance, dans aucun autre pays européen, les artistes, technicien∙ne∙s ou membres des équipes du secteur culturel sont empêché∙e∙s de travailler du fait de leur statut vaccinal. Le passe vaccinal est ainsi en décalage avec le passe sanitaire européen (Certificat numérique de l’Union européenne) en vigueur jusqu’au 22 juin 2022 et risque fort d’impacter plus défavorablement encore la mobilité internationale du secteur et d’abîmer un peu plus les liens qui nous unissent avec des artistes et professionnel∙le∙s culturel∙le∙s de toutes origines.
Le passe vaccinal est une impasse pour la culture. Comme un coup de grâce, il dégrade un peu plus la perception du secteur culturel par la population, fracture les individus en étant source de discorde et achève de démolir le moral des équipes qui font vivre la culture et en sont une richesse cruciale.
Nous voulons sortir de l’impasse au plus vite !
Nous demandons le retrait du passe vaccinal.
Signataires :
- CITI – Centre International pour les Théâtres Itinérants
- FAMDT – Fédération des acteurs et Actrices de Musiques et Danses Traditionnelles
- FEDELIMA – Fédération des Lieux de Musiques Actuelles
- FEMA – Fédération musiques actuelles de Bourgogne-Franche-Comté
- FEVIS – Fédération des Ensembles Vocaux et Instrumentaux Spécialisés
- FNAR – Fédération Nationale des Arts de la Rue
- FRACA–MA – Fédération régionale des acteurs culturels et associatifs – Musiques Actuelles
- FUTURS COMPOSÉS – Réseau national de la création musicale
- GRABUGE – Réseau des musiques actuelles du Grand Est
- GRANDS FORMATS – Fédération d’artistes pour la musique en Grands Formats
- KOLET’ – Réseau des acteurs culturels du spectacle vivant de la Réunion
- OCTOPUS – Fédération des Musiques Actuelles en Occitanie
- PAM – Pôle de coopération des Acteurs de la filière Musicale en Région Sud & Corse
- LE POLE – Le Pôle de coopération pour les musiques actuelles en Pays de la Loire
- RÉSEAU HYBRIDES – Coordination régionale des Lieux intermédiaires et indépendants en Bretagne
- RIF – Réseaux des musiques actuelles en Ile-de-France
- RIM – Réseau des indépendants de la musique en Nouvelle-Aquitaine
- SCC – Syndicat des cirques et compagnies de création
- SYNAVI – Syndicat national des arts vivants
- THEMAA – Association nationale des Théâtres de Marionnettes et Arts Associés
- UFISC – Union Fédérale d’Intervention des Structures Culturelles
- ZONE FRANCHE – Le réseau des Musiques du Monde
CONTACT PRESSE :
Boris Colin | FEDELIMA – coordinateur des collaborations intersectorielles
boris.colin@fedelima.org – 06 13 06 07 29